LES VENTRES AFFAMÉS NE SE RESSEMBLENT PAS:

Japon: le principe du Hara hachi bun me, le ventre jamais plein.

Cameroun: ventre plein, ventre heureux.

Les japonais sont connus pour leur sveltesse. Leurs corps robustes et peu épais font des envieux. Paradoxalement, un paysan de la forêt du sud du Cameroun conclurait « aasshhh, c’est qu’ils ne mangent pas assez. C’est pas bien, qu’ils se forcent, qu’ils mangent pour se remplumer un peu. » Le rapport à la nourriture est-il culturel? La réponse à cette question sera forcément alourdie de nuances. Autant il existe des poches de « bien-manger » soutenues par des régimes traditionnels privilégiant la santé par la nourriture, autant la malbouffe est devenue un phénomène mondial qui traîne son cortège de morbidité. Toutefois, ceux qui mangent bien, qui mangent pour bien vivre, ne sont pas nombreux, et les plus exemplaires sont à Okinawa, l’île des centenaires, avec la plus haute proportion de centenaires du monde, soit un taux d’environ 50 pour 100 000. Dis-moi comment tu manges, je te dirais quand et comment tu mourras.

JAPON: le principe du Hara hachi bun me, le ventre jamais plein.

Les habitants d’Okinawa, au Japon, partagent un secret de polichinelle: ils mangent avec modération des aliments bénéfiques pour leur santé, au point qu’ils semblent être l’un des seuls peuples pratiquant l’auto-restriction alimentaire volontaire. Ils pourraient manger tout et n’importe, mais observent un principe: le Hara hachi bun me (腹八分目), ils respectent « la règle du ventre à 80 % », qui suggère d’arrêter de manger avant d’avoir trop mangé.
Il s’agit de modérer la quantité d’aliments ingérés afin de préserver sa santé. Ainsi, on ne remplit son estomac qu’à 80%, on doit pouvoir se sentir rassasié quand on a atteint ce seuil et même si on ne l’est pas, on arrête de manger, exactement comme s’il y avait quelque chose de gratifiant à quitter la table en ayant encore faim. Oui, il y a effectivement une récompense en terme de longévité et de résistance à la maladie. Quand on fait l’hara hachi bun me, on consomme entre 1 800 kcal et 1 900 kcal par jour, très peu par rapport aux habitudes du reste du monde. Durant les repas, la règle donc est de ne pas manger jusqu’à satiété mais de ne combler que 80 % de sa faim, par une nourriture bénéfique dans laquelle les alicaments tiennent une bonne place.

En matière de diététique, la corpulence et l’état de santé général des japonais fait des émules. On n’hésite pas à prendre exemple sur leur régime pour perdre du poids, pour maintenir un bon poids, et pour éviter les maladies cardio-vasculaires, l’hypertension, les cancers, les diabètes, les maladies dégénératives, l’ostéoporose et d’autres maladies chroniques.

Le bénéfice immédiat de le Hara hachi bun me c’est le confort digestif, qui permet de garder les humeurs stables et l’esprit clair. Le Hara hachi bu s’inscrit dans la philosophie dite Zen. En permettant à l’estomac de ne pas être trop lourd en fin de repas, on préserve son système digestif. Vivre longtemps et mince, voilà ce qu’on y gagne à la fin. Le Hara Hachi Bu n’est pas un régime strict, mais plutôt une philosophie, un mode de vie. On l’applique au quotidien de cette manière:

1 → Respectez la règle des 80%. Écoutez les premiers signes de satiété délivrés par votre corps et arrêtez de manger avant d’être complètement rassasié.

2 → Mastiquez bien chaque bouchée, lentement, avec application, afin d’envoyer une sensation de satiété au cerveau. Un repas en mode Hara hachi bun me est un repas conscient, qui échappe à la distraction et à l’imprudence, où on se concentre sur chaque bouchée, en la savourant comme si elle constituait en elle-même tout un repas.
N’hésitez pas à poser vos couverts entre deux bouchées.

3 → Mangez des aliments riches en nutriments et faibles en calories, comme le miso, les algues, le tofu ou les fruits de mer cuits à la vapeur. Ces ingrédients sont non seulement délicieux, mais ils aident aussi à réduire le risque de maladies chroniques.

4 → Apprenez à différencier la faim réelle des envies passagères
Vous avez faim ou vous êtes stressé ? Une des clés du Hara Hachi Bu est de réapprendre à reconnaître les véritables signaux de faim.Boire un verre d’eau ou attendre quelques minutes avant de grignoter peut aider à mieux comprendre votre émotion.

5 → Contrôlez vos portions
Utilisez des assiettes plus petites pour limiter la quantité de nourriture que vous consommez. Adoptez des plats japonais, qui permettent de servir de petites portions, ce qui va vous aider à manger moins tout en appréciant vos repas.
À celles qui voudraient être minces comme les japonaises, sachez qu’elles cultivent un rapport sain à l’alimentation, en favorisant une diète riche en légumes, poisson, et algues, tout en limitant les sucres et les graisses saturées. La cuisine japonaise, colorée et variée, met l’accent sur la qualité plutôt que sur la quantité.

CAMEROUN: ventre plein, ventre heureux.

Il faut manger, bien manger, pour se sentir vivre. Manger beaucoup et bien ce qui est bon.
Au Cameroun, le type de labeur qu’effectue l’individu lui dicte sa façon de ce nourrir. Celui qui fait des travaux difficiles cherchera des aliments qui pèsent dans son estomacs, que ses compatriotes appellent les bourratifs, parce que le siège de la force c’est le ventre, il vaut mieux qu’il soit plein pour procurer l’énergie nécessaire. Ainsi, on ne livre pas à des activités champêtres par exemple, sans avoir calé son estomac avec la sauce d’arachides de la veille, accompagnée de manioc frais, riche en glucides qui se cachent dans son amidon. Une bonne boule de foufou réconforte aussi celui qui a bien travaillé, surtout si elle est accompagnée d’une sauce complète, dans laquelle on retrouve des fibres (feuilles d’okôk, de baobab, de morelle, etc), des lipides (huile de palme, d’arachides ou de coton), des glucides ( légumineuses, arachides, noix, etc), des protéines (viande, poisson, poulet, frais ou séchés). Celui qui travaille dans un bureau pourra se sustenter dans la cantine ou au restaurant du coin, qui lui proposera des aliments variés et riches en goût, sans que la quantité soit forcément le leitmotiv du service.

Les repas sont variés au Cameroun, seulement leur valeur nutritive ne requiert pas l’attention nécessaire. D’autant plus qu’en matière d’habitudes culinaires, les communautés culturelles tiennent à leurs habitudes, même si ces dernières sont à l’origine de sous-nutrition ou de malnutrition.
Le gouvernement essaie de corriger la donne en favorisant la distribution d’aliments enrichis en vitamines et sels minéraux, comme le riz, l’huile et le lait en poudre, qui sont les aliments les plus partagés.
La modernisation a des effets délétères sur les habitudes alimentaires camerounaises. Ainsi, les camerounais ont découvert les aliments transformés et les fast-foods. Ils s’en donnent à cœur joie. Pizza, hamburgers, shawarmas, crèmes glacées, biscuits, gâteaux, poulet pané sont ingurgités comme s’ils étaient le passeport pour entrer dans le bateau graisseux de la globalisation alimentaire.

La cuisine camerounaise est bousculée par la houle de la « junk food », mais ne cède pas. Elle brandit des étendards savoureux qui sont reconnus dans le monde entier, à savoir le célèbre ndolé, le fameux okôk, l’excellent taro – sauce jaune, la savoureux Eru, l’indémondable poulet DG, l’inoubliable poisson braisé, etc.
Les camerounais aiment manger. Offrir ou recevoir de la nourriture fait le ciment de ces nombreuses relations empreintes de cordialité qui tapissent le vivre-ensemble.
Seulement, les considérations diététiques semblent être l’apanage des riches et des malades, les premiers ont les moyens de leur politique, les seconds ont des obligations qui engagent leur vitalité, les autres essaient de se remplir la panse autant qu’ils le peuvent. Ils mangent chez les gens, et ramènent chez eux un peu de ce qu’ils y ont mangé. On dit qu’ils « emballent ». Quelquefois, l’emballage est prévu et organisé, chacun rentre avec la gamelle prévue à cet effet. Mais, il arrive souvent que l’emballage dévoile des resquilleurs sans aucun scrupule, qui dissimulent de bons morceaux dans des plastiques, en même temps qu’ils mangent.

La restriction alimentaire ? On s’en méfie. C’est un truc à devenir maigre comme un malade du Sida. Il vaut mieux arborer de petites rondeurs qui sont censées indiquer qu’on mange à sa faim, et surtout qu’on a les moyens de sa politique d’abondance alimentaire. Être maigre ce n’est pas forcément être en bonne santé. Être maigre, c’est aussi être fragile, ce qui peut être préjudiciable quand il y a des travaux lourds à effectuer. Il faut avoir de la réserve, en cas de coup dur, tant pis si cette réserve est adipeuse.
Un ventre content, c’est un ventre plein, lesté, un point un trait. Cette façon de voir est encore très partagée et il n’est pas rare qu’une personne présentant un embonpoint soit enviée et félicitée.
Après s’être abîmés dans toutes sortes d’agapes, beaucoup se tournent vers des nutritionnistes et des diététiciens qui ont désormais pignon sur rue. Les plus avisés de ces professionnels de la nutrition proposent des régimes incluant des mets et des ingrédients locaux. Ils sensibilisent aussi la population sur les dangers d’une mauvaise nutrition sur la santé des individus.

Manger. L’humanité avance en mangeant. Elle se consumme aussi en mangeant, parfois en se mangeant. Grâce aux réseaux sociaux, on peut savoir, sans voyager, comment les gens mangent ailleurs que chez soi. On peut adapter son propre régime selon les découvertes culinaires qu’on trouve intéressantes. Et si nous mangions ensemble plus tôt que de boire dans le calice de la xénophobie, du racisme, de l’indifférence, de l’oppression ou de l’asservissement?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *